Charlesbourg – Trait-Carré – Moulin des Jésuites – Édifice
Edgar Gariépy vers 1925 – BAnQ P600,S6,D2,P56
Denyse Légaré :
« Le moulin de Charlesbourg et ses meuniers (1742-1940) »
Société d’histoire de Charlesbourg – 18 décembre 2019
Une enquête d’historienne
Sous les combles du Moulin des Jésuites, habilement restauré au fil des ans, l’historienne Denyse Légaré a réussi à nous tenir en haleine en nous communiquant les résultats d’une recherche historique sans précédent.
Elle nous a habilement démontré comment elle avait réussi à débusquer les sources d’archives pour nous révéler des aspects inconnus de l’histoire d’un établissement commercial actif pendant près de deux siècles, près du Trait Carré, et encore plus fait part comment des pans de l’histoire doivent être parfois réécrits en investiguant des aspects inconnus ou ignorés précédemment. Il est toujours délicat d’exposer comment notre interprétation des faits, qui tente de s’appuyer sur certaines certitudes, dont des écrits précédents, peut parfois nous écarter de ce qui s’est produit véritablement.
Avec un certain humour, parsemé d’ironie, elle nous a fait prendre conscience du défi que présente une telle recherche, surtout lorsque les sources documentaires doivent être dépouillées et décodées méticuleusement, nous faisant parfois bifurquer de faits généralement admis, notamment au niveau des origines de la propriété du moulin et des circonstances ayant conduit à son installation dans la Seigneurie de Notre-Dame des Anges.
Elle nous a entrainé dans les coulisses de l’histoire en ayant élargi les perspectives et considéré les lointaines origines de la colonisation du territoire, autant par les Jésuites que par les Récollets. Par exemple, elle a bien évoqué les conséquences administratives de l’absence de lettres patentes qui auraient facilité l’implantation de cette meunerie, dans laquelle on a soutenu le commerce du blé moulu dans la région, jusqu’à sa vocation tardive où on aura vu le moulin diversifier sa production, comme pour toute entreprise moderne.
Qui savait qu’on y a même fabriqué des allumettes? Et que dire de cette relation d’entraide entre les Jésuites et les Récollets, notamment des difficultés posées par leur exil et leur retour tardif sur le territoire suite à l’occupation des Britanniques? Il faut parfois ratisser large pour comprendre certains enjeux de la colonisation et du fonctionnement du régime seigneurial.
Mais c’est à travers l’écheveau complexe, mais pourtant serré, des liens de parenté qu’on a senti comment la succession des locataires et des propriétaires aura réussi à faire survivre le moulin, malgré les multiples défis posés par un conseil législatif parfois rébarbatif dans ses décisions, rendant les conditions idéales de production plus difficiles, notamment en retardant des travaux d’entretien et résultant en une détérioration rapide des équipements d’infrastructure ou encore les problèmes d’érosion du sol causé par le détournement d’un cours d’eau de ses voies naturelles. Aurait-on cru que des travaux de drainage d’une ville, pour alimenter son aqueduc, aient des conséquences aussi fâcheuses, au point de priver le moulin de son énergie vitale? Belle leçon ici qu’on aura appris non seulement sur l’histoire, mais aussi sur la politique. Et que dire de ce procès dans lequel aura été débouté un des propriétaires qui aura vu sa production minée par une ponction de la source devant avant tout faire tourner les turbines de son moulin?
Ce qui est le plus étonnant de la recherche de Madame Légaré, c’est d’avoir réussi à clarifier une histoire qui semblait parfois ennuagée par des inconnues et soutenue par des écrits qui ne révélaient pas tous les tenants et les aboutissants d’une histoire qui ne demande qu’à se révéler, sentant que certaines parties sont encore entourées d’un voile qui pourra finalement se lever par la publication de ses résultats. Ceci devrait permettre de continuer ce dialogue avec l’histoire locale et régionale. Le Moulin de Charlesbourg est un trésor patrimonial et la progression récente de la recherche historique est une valeur ajoutée qui contribue à lui donner encore plus de valeur et à créer encore plus d’attrait.
La persistance de notre mémoire, grâce à la patience d’une historienne bien engagée dans sa recherche d’une part et enthousiaste dans la communication des enjeux qu’elle a posé d’autre part, voilà ce qui nous motive à mieux connaître la richesse du patrimoine régional; on voit bien qu’une partie nous échappe encore.
La Société d’histoire de Charlesbourg contribue notablement à l’amélioration de notre connaissance, en plus d’assurer la pérennité des trésors qui nous sont légués, autant que d’autres qui sont disparus. Qui sait quelles surprises nous découvrirons encore? Nous souhaitons donc les suites les plus heureuses à cette initiative et souhaitons ardemment que la Société d’histoire continuera à soutenir madame Légaré dans la publication éventuelle de cette recherche inédite.
Toujours aussi agréable de découvrir le patrimoine canadien…
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Merci bien, le confinement permet de reprendre le collier. Il y a de nouveaux articles en préparation, dont un sur la pandémie sur la Côte Nord-Ouest, à la fin du XIXe siècle. On verra comment la variole a pu décimer les Premières Nations, au Canada… les statistiques qui seront jointes à l’article permettront de relativiser avec notre triste virus… À Bientôt :)
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