Ah, ce parc Lafontaine

Depuis que ce bel espace de verdure a été nommé en l’honneur de Louis-Hyppolite Lafontaine en 1901, il y a autant d’histoires du parc Lafontaine qu’il y a de personnes l’ayant fréquenté. Ces histoires leur appartiennent. Du fond de leur mémoire, certains moments magiques de leur vie s’y cachent encore.

On le devine aisément.

Diaporama Flicker

La période du solstice d’été est ce moment où les pelouses sont les plus occupées, peut-on dire. Un bon temps pour se promener, mais aussi pour garder un oeil derrière le viseur de son appareil photo ou de sa caméra vidéo. Trouver le bon moment, le bel angle ou le bon éclairage fait partie du plaisir de la promenade, ou même de l’art de flâner si on préfère.

Une fois écoulées ces heures merveilleuses, on peut s’enfermer chez soi pour brasser toutes ces images et ces sons dans les entrailles de son ordinateur personnel. Ou de sa tablette. Ou encore de son appareil mobile intelligent. Nous ne sommes plus à l’époque des photographes ou des cinéastes qui se promenaient avec leurs appareils encombrants, montés sur un gros trépied de bois avec ses ferronneries de béton. Ni à l’époque des ombrelles et des longues salutations courtoises.

Tout ceci s’oppose à l’ère de la communication instantanée sur les médias sociaux. On est parfois soucieux de partager une trouvaille intéressante ou humoristique sur Facebook. On publie sur le champ la photographie d’un plat qu’on s’apprête à manger dans tel restaurant ou tel café. Et n’oublions pas qu’Instagram permet de partager instantanément un moment capturé sur son téléphone intelligent, et plus récemment une séquence vidéo de quinze secondes.

Alors, il faut être anachronique pour partager un documentaire de dix minutes, patiemment bricolé sur son ordinateur personnel. On a cette nostalgie des vieux documentaires de l’ONF, en noir et blanc, qu’on peut regarder sur sa tablette. Pourtant, il se pourrait bien que la nouvelle technologie nous donne le goût de renouer avec la tradition. Mais oubliez les commentaires au ton ronflant. Pour le parc Lafontaine, on pense à la guitare, presque par défaut.

Si vous êtes dans un état d’esprit pour vous arrêter dix minutes, vous pouvez alors vous engager dans cette balade. Mais ne vous attendez pas à un montage syncopé ni rapide ni plein de rebondissements. C’est un peu dans l’esprit de cette lecture proposée ci-dessous, si vous préférez les livres. Car il est essentiel de réapprendre à apprivoiser la lenteur.

Si vous avez une idée pour jouer au cinéaste, c’est un bon endroit. Pour ma part, je traverse parfois trop rapidement le parc, sauf en été pour flâner. Mais filmer et photographier nous fait-il éviter les gens?

Flâner ce n’est pas suspendre le temps, mais s’en accommoder sans qu’il nous bouscule

PIERRE SANSOT

Lorsque les journées s’allongent, il ne faut plus se presser, surtout au solstice d’été. Autrement dit, vaut mieux flâner… La fin du jour se fait attendre; une fois sonnée la vingtième heure, on s’y retrouve et on s’y perd. La nuit tiendra-t-elle ses promesses, pour suivre ce jour de chaleur?

Pour reprendre la citation à la fin de la vidéo, on pourrait ajouter ceci, tel qu’il apparaît dans fiche bibliographique chez Payot & Rivages:

« Une certaine forme de sagesse se reconnaît à la volonté de ne pas brusquer la durée, de ne pas se laisser bousculer par elle, pour augmenter notre capacité à accueillir l’événement. Nous avons nommé lenteur cette disponibilité de l’individu. Elle exige que nous donnions au temps toutes ses chances et laissions respirer notre âme à travers la flânerie, l’écriture, l’écoute et le repos ».

L’étang du parc est effectivement un merveilleux endroit où se prélasser avant que la nuit ne nous enveloppe. Tantôt on voit ces jeunes rassemblés autour d’un arbre, ce poteau qui constitue toujours un centre du monde quand on s’y rassemble. Tantôt on observe ces passants enjambant un pont au-dessus de cette petite cascade. Tantôt on est entouré de quelques chiens qui courent – se courent ou se font la cour – et qui jappent hardiment. Tout est prétexte à l’émerveillement devant ces activités qui peuvent pourtant paraître bien banales, mais qui sont pourtant au coeur de notre vie sensible.

Observer ces événements à travers le petit écran de sa caméra, pour capturer le mieux qu’on peut quelques moments fugaces, voilà aussi un des plaisirs du vidéaste dilettante en fin de journée. Quand on revient chez soi, qu’on sort le caméscope de son sac à dos pour passer les images dans la moulinette magique de la table de montage, un plus grand plaisir naît encore.

On tente de faire revivre cet univers pour organiser le tout dans une petite composition agréable, s’assurant même que des personnages entrent et sortent de chaque écran, dans un ballet ordonné, contre ce chaos désordonné de la réalité qui se présente dans un état brut, sans qu’on la manipule.

Mais le vidéaste n’est pas seulement un voyeur, ni un spectateur, mais plutôt un manipulateur cherchant à embellir des choses. Elles sont pourtant déjà bien jolies, sans intervenir avec une moulinette à image. Mais qui peut résister à ajouter une couche supplémentaire de beauté, comme chorégraphier ces gens qui passent sur le pont. Apparemment, on appelle cela de la créativité!

Mais il y a mieux… allez donc prendre une marche dans le parc maintenant.

Va!

2 réflexions sur “Ah, ce parc Lafontaine

  1. Ta photographie est magnifique Claude. Les atmosphères nous invitent à l’abandon dans ce parc où l’on chemine avec toi.

    Déjeuners sur l’herbe, gros plans sur les pieds, lumières rasantes, verts des arbres en mouvement. Alternance judicieuse des plans, des sujets, parfois un couple que l’on suit.

    Une petite critique constructive : à partir du Restaurant (type à la guitare) il y a de petites longueurs et des retours (guitare-resto-guitare…) moins réussis à mon sens. Manipulation des couleurs aussi. Cela se situe dans la deuxième partie. Bravo sinon!!!

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    1. Ça fait plaisir de recevoir un petite recension. Je retiens ton propos, en tenant compte aussi que j’ai eu un petit décrochage technique, quelques pépins devant lesquels j’ai un peu démissionné.

      En plus, cette seconde version – la première est encore disponible dans la chaîne YouTube – se voulait une mise à jour. On écrit toujours le même roman, dit-on. Cette vidéo s’inscrit aussi dans ce courant. Je vais oser une troisième version.

      Quant aux longueurs, je le concède, elle n’évoquent peut-être pas la flânerie, telle qu’évoqué dans la citation au générique. Je n’ambitionne pas les 315 minutes de Bertolucci, dans son film 1900… Je suis loin de la cinématographie italienne avec ma caméra joujou en tournant seul, mais sois rassurée, cela m’amuse et me détend.

      Je présenterai bientôt quelque chose de différent. J’expérimente.

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